Graciela Iturbide, Juchitan

Le 24 novembre sortira dans les salles de cinéma françaises (le film a déjà été projeté en Italie) Frida, viva la vida, documentaire réalisé par Giovanni Troilo avec pour narratrice l’actrice Asia Argento. Si la vie de Frida Kahlo continue d’inspirer les cinéastes après le biopic de Julie Taymor (Frida, 2002) avec Salma Hayek dans le rôle-titre et Alfred Molina dans celui de Diego Rivera, cette dernière réalisation est décevante. Sujet survolé, approximations (au sujet de l’état de santé de la peintre), choix esthétiques kitch discutables… Pour une critique exhaustive, on se référera à celle publiée sur le site cinescribe.

Néanmoins, ce documentaire a le mérite de donner la parole à une autre artiste mexicaine, la photographe Graciela Iturbide.

Le lien entre les deux femmes est leur pays d’origine et la même fascination qu’il exerce sur elles. Frida s’inspire de la tradition des ex-votos pour ses œuvres les plus poignantes. La mort est sa compagne et à l’instar de nombreux mexicains, elle se rit d’elle afin de l’apprivoiser.

Le rêve, 1940.

De la même manière, Graciela Iturbide, élève de Manuel Álvarez Bravo, n’a cessé de documenter la relation de son peuple avec la mort en photographiant parades à la fois morbides et joyeuses lors de la fête du Dia de los Muertos, cimetières, pleureuses etc… De son professeur, elle a hérité un même amour du noir et blanc et de l’approche anthropologique.

Cementerio, Juchitán, 1988, Fundación Mapfre

Novia muerte, Chalma, Estado de México, 1990, copyright Graciela Iturbide

Autant Kahlo a peu voyagé en raison de sa santé fragile, autant la photographe n’a cessé de se rendre dans les communautés indigènes qui constellent le pays, parcourant le pays du nord au sud, visitant le Chiapas, l’état de Oaxaca, le Michoacán, le désert de Sonora

Mujer Ángel, Desierto de Sonora, 1979 © Graciela Iturbide. Courtesy of Fomento Cultural Banamex, A.C

Graciela Iturbide, Tehuantepec, Oaxaca, 1985, tirage gélatino-argentique, 14,3 x 22,2 cm, Brooklyn Museum, © Graciela Iturbide

La niña del peine, Juchitán, Oaxaca, 1979 © Graciela Iturbide. Courtesy of Fomento Cultural Banamex, A.C.

Alors que Frida s’inspirait des vêtements traditionnels des femmes du Juchitán pour élaborer ses propres tenues, Graciela Iturbide a immortalisé les coutumes des membres de cette société matriarcale dans une série de clichés simplement appelée Juchitán.

Nuestra Señora de las Iguanas, Juchitán, 1979, © Graciela Iturbide; Courtesy Museum of Fine Arts, Boston

Graciela Iturbide, Baile (Dance), Juchitán, 1986; Courtesy of the artist; © Graciela Iturbide

Manos poderosas, 1986, © Graciela Iturbide

Elle s’est aussi intéressée aux muxhe, ces hommes habillées en femmes qui dans la culture Zapotèque, sont respectés.

Magnolia with Sombrero, Juchitán, 1986; Museum of Fine Arts, Boston © Graciela Iturbide; Courtesy Museum of Fine Arts, Boston

Enfin, ultime lien avec Frida Kahlo, elle a été autorisée à photographier les multiples appareillages qui avaient été mis « sous scellés » en restant enfermés dans la salle de bain de la peintre pendant plusieurs décennies. Malicieuse, elle s’est permise une mise en scène avec ses propres pieds (dont elle souffre depuis plusieurs années) dans la baignoire de Frida.

El baño de Frida Kahlo, Coyoacán, Ciudad de México, 2006, © Graciela Iturbide

El baño de Frida Kahlo, Coyoacán, Ciudad de México, 2006, © Graciela Iturbide

A 78 ans et malgré la pandémie, Graciela Iturbide a plein de projets. Si la situation politique et la violence actuelles au Mexique l’empêchent de se déplacer comme autrefois [1], elle prépare de nouvelles expositions.

[1] « Graciela Iturbide, le Mexique et la grâce », Charlotte Brunel, Vogue Paris spécial Mexique, avril 2021

 

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